Argumentaires
Piège principal de la rhétorique des Sleeping Giants, tout opposant est un affreux fasciste qui s’ignore, ou pas. Pour un peu, ils vous demanderaient votre dernier bulletin de vote. Heureusement nous vivons en démocratie, et le délit d’opinion n’existe pas. Avoir des opinions radicales n’est pas un crime.
Deuxièmement, il faudrait pouvoir prouver que CNews ou VA sont véritablement d’extrême droite ce que les Sleeping Giants ne s’emploient pas à faire.
Pour cela il serait utile de définir l’extrême droite qui est un concept plutôt flou de nos jours.
Ensuite, on peut très bien être pour l’existence de plusieurs médias et à ce titre s’opposer aux Sleeping Giants sans pour autant être d’extrême droite.
Les Sleeping Giants chercheraient à abattre le Figaro ou Charlie Hebdo en coupant leurs ressources publicitaires que cela n’en serait pas moins scandaleux.
On peut d’ailleurs vouloir lutter contre l’extrême droite et pour ce lire ses propos, sinon comment faire ?
Enfin, n’oubliez jamais que les Sleeping Giants ont précisément une lecture extrême du monde et qu’en propageant la haine des médias conservateurs, ils produisent exactement ce qu’ils voudraient combattre à savoir un ralliement des internautes aux idées d’extrême droite.
“C’est à l’opinion publique à faire justice à ces petits tribunaux qui s’élèvent de leur propre autorité” Bernardin de Saint-Pierre, La chaumière indienne, 1790
Les Sleeping Giants ne sont pas innocents, car ils refusent le débat public. Ils pourront toujours déclarer qu’ils ne font qu’informer les marques, et que les médias qu’ils ciblent peuvent trouver d’autres ressources : en vérité, dans leur logique, rien ne les arrange plus que de voir couler les organes de presse qu’ils ciblent.
Ces pertes de revenus publicitaires qui affectent directement les médias qu’ils condamnent ont pour but évident de les faire disparaître.
Si ces procédés ne s’apparentent pas à de la censure pour délit d’opinion, comment les qualifier ?
Ils n’ont rien d’innocent aussi, car la politesse avec laquelle ils interpellent les marques est totalement biaisée. Passons sur l’utilisation d’emojis réservés au troisième âge, le lexique de bon bourgeois offensé “toxique”, “nauséabond”, etc.
Le plus malhonnête dans leur démarche est la mise en balance de l’opinion publique qui prend en otage les marques, car ces dernières craignent que leur interpellation détériore leur image.
La guimauve moralisatrice et sûre d’elle-même des Sleeping Giants effraie les marques, qui pensent avoir affaire à un mouvement populaire de bon sens, et abdiquent par peur de la désapprobation. Les Sleeping Giants prétendent ne pas afficher les marques qui ne réagissent pas, mais ne se privent pas pour les relancer en public quand la réponse ne vient pas assez vite, ou plus simplement pour féliciter leurs victimes comme un patron de mafia félicite ceux qu’il exploite : ainsi, les marques non félicitées apparaissent implicitement comme de “mauvaises marques”.
Ils n’ont enfin rien de pertinent, car en plus de la mascarade de liberté d’expression que prétendent prôner les Sleeping Giants, malgré leurs méthodes de caïds, ils demandent à des acteurs économiques de prendre position sur des sujets politiques. Qui se soucie que Deliveroo se désolidarise de CNews alors qu’on leur demande d’abord de bien nous livrer et de mieux traiter leurs livreurs ? Qui peut tirer satisfaction de voir Bayer félicités par SG d’avoir retiré leurs pubs de l’émission de Zemmour, tout en étant l’un des plus gros pollueurs mondiaux et une source inépuisable de scandales sanitaires et financiers ?
Les Sleeping Giants sont les idiots utiles du capitalisme de 2021, ou peut-être même ses complices. Ils poussent les marques à donner une image qui satisfait des excités, sur des sujets où ils ne sont normalement pas attendus, et sans jamais interroger les problèmes les plus criants.
“Si on ne croit pas à la liberté d’expression pour les gens qu’on méprise, on n’y croit pas du tout” Noam Chomsky
La liberté d’expression permet le débat honnête et rigoureux. Or le débat, comme recherche de la vérité, de ce qui est le mieux pour la communauté, est le fondement de notre tradition philosophique et politique, depuis les démocraties de la Grèce Antique jusqu’aux Lumières, en passant par la disputatio de nos premières universités.
On pourrait nous répondre qu’une liberté d’expression sans limites inclut l’appel au meurtre, les propos terroristes ou malveillants : mais ces propos publics sont, comme ceux des SG, destinés à provoquer une action sans possibilité d’en débattre, et s’excluent eux-mêmes du cadre de la liberté d’expression telle qu’elle fonde nos démocraties.
Nous défendons donc la liberté d’expression comme liberté d’émettre des opinions et de faire des propositions pour la vie en société.
Cela passe nécessairement par un jeu à armes égales d’une diversité de paroles dans l’espace public, donc dans les médias et dans les idées auxquelles les médias donnent de la visibilité. C’est le sens de la liberté de la presse garantie par nos lois, ou tout simplement de l’absence de monopoles médiatiques, même si l’indépendance de la presse ou de l’audiovisuel n’est pas parfaite.
En dénonçant les Sleeping Giants comme “wokes”, nous n’appelons donc pas au bannissement de leurs théories, ou de la vision de la société qu’ils proposent : nous leur dénions simplement le droit de faire autorité comme censeurs. Et surtout, nous pointons que leur refus du débat est incompatible avec l’esprit démocratique.
“La presse est libre, cela présente des inconvénients, mais moins que l’absence de liberté.” François Mitterrand, Conférence de presse à Sofia, 1989
Depuis la loi du 29 juillet 1881, la liberté de la presse est garantie, et il n’existe pas de délit d’opinion. Dès lors, le fait de qualifier un média comme produisant un discours de haine, qualification relative, est une aberration.
Oui, nous vivons dans une société morcelée, oui, cette société est violente. Dénoncer cette violence, dénoncer ce morcellement appelle forcément la production d’un discours radical. Mais la radicalité n’est pas la haine. Quand Monsieur Zemmour déclare : “Non c’est pas un massacre, ben oui c’est la guerre. Ou on massacre ou on est massacré.” Il en a le droit. Que vous soyez révulsés, choqués ou en colère, il ne s’agit que de votre réaction, et elle ne concerne que vous. En résumé, pour celui qui trouve ces propos détestables, rien ne justifie la mise à l’amende de toute une rédaction.
La censure ne fonctionne pas autrement : on isole une déclaration, on assimile l’opinion de tous les lecteurs à cette dernière, on fait taire celui qui dérange. C’est un procédé fallacieux pour la simple et bonne raison que la pensée d’un homme est plus complexe qu’une citation sortie de son contexte. S’élever contre Monsieur Zemmour est un droit, pour certains c’est même un devoir, libre à eux. Mais qu’ils l’affrontent à armes égales, respectant une loi du talion journalistique : pour un article, un article contraire, pour une prise de position, une prise de position contraire, etc. Mais faire fermer un journal, brûler un livre, interdire un débat, ce n’est pas résister contre la mise en péril de la démocratie, c’est acter ce péril.
Vous voulez vivre dans un pays libre ? Cela implique de ne plus croire que vous ne serez jamais froissé, jamais contredit, cela implique d’accepter d’être dérangé, moqué, ridiculisé.
La liberté exige du courage, de l’abnégation, de la prise de distance, de l’autodérision. Les Sleeping Giants veulent vous faire croire que vous êtes faible, que vous êtes une victime, que vous avez le droit de réclamer justice dès que l’on vous offense. Les Corsaires pensent que vous avez le droit de répondre, d’être insolent, de choquer, et cela pour le plaisir, pour défendre une cause, ou par simple esprit de contradiction. Mais nous vous laissons le choix.
“Qui est légitime ? Nul n’est légitime.” Balian dans Kingdom of Heaven.
La censure des Sleeping Giants pose la question cruciale de leur légitimité. Elle s’articule autour de deux pôles :
1) Ils sont du côté du Bien
2) Ils parlent pour le Peuple
Ces deux principes sont faux.
Le bien, tout relatif, n’existe pas socialement, on peut se référer aux travaux de Dostoïevski (Les Possédés), qui nous apprennent qu’au service du bien, l’homme est capable des pires atrocités. La grande question des Possédés c’est de savoir si le Bien peut justifier le terrorisme. La résolution de ce conflit n’est pas aisée, elle nous importe peu. Ce qui compte avant tout, c’est de comprendre que les Sleeping Giants sont de nouveaux dévots, qui, en lieu et place du Bien Commun, veulent un monde qui protège et sécurise les minorités qui se définissent par des particularismes arbitraires (l’orientation sexuelle, la couleur de peau, les croyances religieuses, etc.). Les individus qui adhèrent à ce discours considèrent que leurs particularismes leur donnent accès à des droits “sur-mesures”. Les offenser directement ou indirectement, les moquer, ce n’est pas s’exprimer librement, c’est se rendre coupable d’un crime. Il s’agit donc, dans ce cas, d’une agression condamnable, à censurer.
Quand vous serez face aux Sleeping Giants, n’oubliez jamais qu’ils ne représentent personne à part eux même. Ils ne sont pas élus, ils ne détiennent leur autorité de personne, mais ils sont persuadés qu’ils parlent pour le Bien, et jouent sur cet ascendant moral. Il y a bien sûr une façade de neutralité, de bienveillance, mais qui cède rapidement la place à de l’intimidation mielleuse vis-à-vis des marques, et à un rejet malhonnête des particuliers comme vous. Le blocage est systématique face à leurs contradicteurs, à qui ils ne se privent pas de laisser auparavant une dernière réponse pour donner à des tiers l’impression qu’ils ont le dernier mot.
“Sauvons la liberté, la liberté sauve le reste” Victor Hugo, Choses Vues, 1851.
La liberté commence avec le libre arbitre. Elle est inscrite dans notre chair avant de l’être dans la loi. Tout homme y aspire, lutte pour elle, tente de la conquérir. Nous, Corsaires, ne sommes pas étrangers au commun des mortels. C’est la raison pour laquelle nous affirmons que nous voulons “La liberté ou la mort”.
Cette liberté n’est pas un rêve exotique, elle est concrète en ce qu’elle nous permet au jour le jour d’agir, de penser, d’apprendre et de contester ce qu’il nous plait ou nous déplait, tant que cela reste permis, par les lois écrites ou par les coutumes héritées.
Mais, aujourd’hui, ce droit devient un privilège qui ne concerne plus qu’une minorité autoproclamée… L’apparition des réseaux sociaux, avec ses possibilités neuves, entraîne la naissance de nouveaux censeurs.
Nous pensons que tout peut être dit, sous réserve de n’être ni injure, ni appel à la violence, et encore moins, négation de l’humanité de notre contradicteur.
Nous pensons, aussi, que l’argumentation, le style, le panache et l’esprit peuvent vaincre l’ignorance et la bêtise.
Il est donc évident que ceux qui promettent d’abolir la bêtise et la haine sont les vrais censeurs, tant cette ambition impossible a toujours produit des tyrans. Nous luttons contre la haine par l’humour, contre la bêtise par l’amour, contre l’ignorance par l’insolence.
Le postulat de base de cet argument est le suivant : si la race est un critère, négatif ou positif, la race détermine le traitement qu’on fait d’un individu. On peut très logiquement parler du racisme le plus pur.
Militer pour sa “race” pour qu’elle domine ou pour qu’elle obtienne réparation, peu importe en réalité, c’est condamner l’universalisme que nous défendons, c’est être raciste.
Les réunions non mixtes, l’obsession de l’homme blanc responsable de tous les maux du monde, c’est raciste, tout simplement parce que l’on parle de l’homme “blanc”.
Nous ne militons pas pour la domination de l’homme blanc, quoi qu’ils disent. Nous avons prouvé à l’histoire que les vrais racistes sont tous les mêmes, ils sont incapables de considérer le monde autrement qu’en le lisant sous le prisme égocentrique de leur petite existence personnelle. Ils n’ont aucun souci du bien commun ou de la faculté des hommes et des femmes à dépasser leurs particularismes pour s’offrir au monde. Ils ne peuvent rien donner puisqu’ils conditionnent le don en fonction de particularismes de plus en plus absurdes : je ne défendrai jamais un blanc, je ne défendrai jamais un homme, je ne défendrai jamais un chrétien semblent nous dire les Sleeping Giants.
Par définition, les antiracistes et plus largement les progressistes-déconstructeurs ne font qu’essentialiser les individus : je suis ma race, je suis ma sexualité, je suis ma classe sociale. Ils rejetteront un catholique conservateur noir, un écrivain homosexuel monarchiste, une femme de gauche mère de sept enfants et contre l’avortement, une lesbienne qui trouve la Gaypride grotesque, etc. Tout ce qui sort de leur logiciel provoque une erreur système qui les rend muets.
Les antiracistes sont donc les vrais racistes, et puis, n’oubliez pas, l’homme « blanc cis » n’a pas inventé l’esclavagisme, mais il y a mis fin.